• Tensions après le coup de fil de Macron

    L'appel du président a provoqué la colère des sénateurs qui enquêtent sur l'ex-chargé de mission. Ils plaident la séparation des pouvoirs.

     
    "Si quelqu'un doit calmer le jeu, ce n'est pas nous, c'est monsieur Benalla qui fait très fort dans l'insulte des représentants du peuple", a jugé l'un des deux rapporteurs de la commission d'enquête.
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    "Si quelqu'un doit calmer le jeu, ce n'est pas nous, c'est monsieur Benalla qui fait très fort dans l'insulte des représentants du peuple", a jugé l'un des deux rapporteurs de la commission d'enquête."  

     

    Un coup de fil très inhabituel d'Emmanuel Macron à Gérard Larcher, président du Sénat, à propos du traitement de l'affaire Benalla, a provoqué la colère des sénateurs qui enquêtent sur la position qu'occupait l'ex-conseiller à l'Élysée.

    "Qui est ce bagagiste, comme l'a dit monsieur Castaner, cette petite frappe, monsieur Benalla, pour qu'il puisse bénéficier du soutien de tout l'appareil d'État?", a tonné jeudi le chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau sur RTL. Objet du courroux sénatorial: selon le site de L'Obs, Emmanuel Macron a appelé mardi le président du Sénat pour lui demander de garantir les équilibres institutionnels, estimant en substance que la commission sénatoriale sur l'affaire Benalla s'en éloignait.

    Silence de l'Élysée

    Les échanges avaient été rudes le jour-même entre les sénateurs et l'ex-conseiller de l'Élysée, qui est allé jusqu'à juger la commission "illicite", qualifiant ses membres de "petites personnes" et son président Philippe Bas, issu de l'opposition LR, de "petit marquis".

    L'entretien a bien porté, entre autres, sur la commission d'enquête sénatoriale, mais également sur des sujets législatifs, a simplement précisé la présidence du Sénat. Silence en revanche à l'Élysée, où l'on s'est refusé à commenter l'information.

    Plusieurs questions se posent: le Sénat est-il dans son rôle en enquêtant sur l'affaire Benalla? Le coup de fil présidentiel constitue-t-il de son côté une ingérence de l'exécutif sur le pouvoir législatif? Les contacts, téléphone, rencontres inopinées... entre l'exécutif et les présidents des Assemblées n'ont rien d'exceptionnels et sont rarement médiatisés. Du point de vue juridique en revanche, les experts rappellent que la Constitution dit que le chef de l'État veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics.

    François Bayrou "n'approuve pas" les "attaques" contre le Sénat

    "Est-ce que le Sénat, en ayant constitué une commission d'enquête sur l'affaire Benalla, provoque un dysfonctionnement des pouvoirs publics ? La réponse est non !", tranche Dominique Rousseau, professeur de droit à Paris-1. "Si ce coup de fil a effectivement été donné et si des remontrances ont été faites au président du Sénat, elles sont du point de vue constitutionnel totalement inadéquates. Il y a là une atteinte à la séparation des pouvoirs", souligne-t-il.

    Dans un entretien au Figaro publié jeudi, le président du MoDem François Bayrou, allié d'Emmanuel Macron, explique qu'il "n'approuve pas" les "attaques" contre le Sénat. "Je défends un Parlement de plein exercice, respecté, mieux équilibré, qui exerce sa mission de contrôle de l'exécutif", a-t-il dit.

    En enquêtant sur la position d'Alexandre Benalla à l'Élysée, la commission sénatoriale enquête surtout sur le fonctionnement de la présidence. "Ce qui se passe actuellement me paraît être dans l'ordre d'un fonctionnement régulier des pouvoirs publics", conclut Dominique Rousseau.

    "Si quelqu'un doit calmer le jeu, ce n'est pas nous"

    L'opposition sénatoriale, droite et gauche, s'insurge, elle, contre les interventions de l'exécutif au "travail sérieux" du Sénat. "On voit tout l'appareil d'État, du président de la République à la Garde des Sceaux, à monsieur Griveaux (porte-parole du gouvernement), se coaliser pour soutenir monsieur Benalla", dénonce Bruno Retailleau.

    La ministre de la Justice Nicole Belloubet a dénoncé mercredi l'"instrumentalisation" politique de l'affaire Benalla. Benjamin Griveaux a lui fustigé "l'ambition politique personnelle" de Philippe Bas.

    "Si quelqu'un doit calmer le jeu, ce n'est pas nous, c'est monsieur Benalla qui fait très fort dans l'insulte des représentants du peuple et qui, compte tenu de ses exploits, n'est pas très bien placé ni pour proférer des injures ni pour donner des leçons de morale", a jugé Jean-Pierre Sueur (PS), l'un des deux rapporteurs de la commission d'enquête.

     


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